René Lemay, du côté de l’orient | 2007 | Revue Parcours

Robert Bernier

Pour un artiste vivant au Québec, s’ouvrir au marché de l’art hors de la province est presque devenu une nécessité, tant il est de plus en plus difficile de vivre convenablement de son travail en offrant ses oeuvres qu’au Québec.

Pour la plupart d’entre eux, le marché logique à conquérir, compte tenu de la position géographique demeure les États-Unis, particulièrement la côte est. Il y a aussi, bien entendu, le marché canadien et les villes de Toronto, Calgary et Vancouver. Certains, plus originaux ou épris d’aventure, pensent à l’Orient : l’Indonésie, le Vietnam, la Thaïlande ou la Chine. René Lemay est l’un de ces artistes qui longent du côté de ce continent mystérieux. Il se rend à chaque année en Asie depuis 1998. D’année en année, l’aventure se concrétise. Au fil des rencontres, le marché s’ouvre, tranquillement mais sûrement. « Lors de mes premiers voyages, j’ai surtout concentré mes efforts à Bali. Un ami des Îles-de-la-Madeleine, Jean-François Cyr, m’avait parlé de ses voyages en Indonésie. Je trouvais ça fascinant et j’y suis allé pour la première fois en 1998. Ce fut tout un choc ! J’étais émerveillé par ce paysage. » Aussitôt, il rencontre plusieurs artistes dont Paul Husner, un Européen d’origine qui vit et peint Bali depuis des années. René Lemay comprend vite que s’il veut percer dans ce pays, il lui faudra être présent. Il cherche un atelier et en trouve un dans une rizière qui a une splendide vue sur le mont Agung. Il fait aussitôt la découverte au Musée Neka d’un artiste qui le fascine, Made Sumadiyasa. Il s’agit d’une peinture abstraite, éclatante de couleur et très gestuelle. Plus tard, il rencontre l’artiste qui deviendra un ami. Il fait également la rencontre d’un peintre connu en Indonésie, Arie Smit. D’origine hollandaise, il a été prisonnier de guerre (au cours de la Deuxième Guerre mondiale) et lors de la libération, il a décidé de rester dans le coin. Lors de ce premier voyage, surtout exploratoire, René Lemay peint relativement peu (moins de vingt tableaux) mais les assises y sont établies.

Il revient l’année suivante et s’installe à Panestatan, un quartier des hauteurs de Bali. Devant sa maison, toujours cette vue du mont Agung qui dévore l’horizon. Sa demeure est entourée de végétation, d’hibiscus, d’orchidées, de bananiers et d’autres fleurs toutes aussi extraordinaires les unes que les autres. Il peint de grands formats. L’inspiration est au rendez-vous. Il fait à cette époque la rencontre d’Agung Rai, un riche collectionneur qui soutient plusieurs artistes. Il possède un musée, le Arma Museum et est également propriétaire de la galerie d’art Agung Rai Gallery. Il aime beaucoup la peinture de Lemay. L’aventure devient de plus en plus concrète. En plus de l’exposer, il le place dans les grands encans de Singapour, il fait sa promotion et lui assure une présence même lorsque l’artiste repart pour le Canada.

L’année d’après, tout en conservant ses acquis à Bali, René Lemay décide de déployer ses énergies au Vietnam. C’est là qu’il s’initiera à la technique de la laque qu’il étudie à l’École des beaux-arts d’Hanoï, qui lui fournit même un atelier. Il est aux oiseaux. Cette technique le fascine. Il produit une dizaine de tableaux qu’il expose un peu plus tard à la Galerie l’Harmattan de Baie-Saint-Paul. C’est à partir du Vietnam que les choses vont commencer à bouger de manière plus soutenue. De fil en aiguille, il réussit à présenter sa première grande exposition solo en Asie, à Bangkok, en Thaïlande, à la Carpediem Gallery, en mars 2006. Cette même exposition, (les tableaux vendus sont remplacés) est présentée en août de la même année à Hanoï, à la Viet Fine Arts Gallery. Il la présentera également à Bali, à Singapour et tout se place pour la présenter à Shanghai, en Chine. En attendant, il expose en solo en juillet prochain avec la Carpediem Gallery, à l’hôtel Sofitel, un établissement de grande classe situé à Bangkok, et capable d’offrir un espace plus vaste qu’à la Galerie. Il s’agit d’une première expérience de ce genre pour cette galerie.

René Lemay n’a pas l’intention d’en rester là, bien au contraire. Plusieurs autres projets semblent prendre forme et les prochaines années risque d’être riche en événement. À suivre avec intérêt.